Volver Académie/Pédagogie

Accueil Espagnol

 

  Début | Présentation | Potages et soupes | Légumes | Poissons | Viandes| Desserts


La brochette de grives
Repas d'hiver à Lorgues, Var

une brochette d'une quinzaine de grives
bardes de lard
baies de genièvre
sel et poivre
accompagnement :
salade sauvage du jour
huile d'olive maison
pain de campagne
vin rouge de pays
en apéritif :
Pastis pour les hommes
vin de pêche ou vin de noix pour les femmes

 flores.gif (3171 octets)

C'est mon enfance. La Provence il y a 40 ans.
Un repas traditionnel, simple mais très convivial. Un repas de chasseur, préparé en grande partie par celui-ci.
En premier lieu cela me rappelle le beau ciel de "chez moi", les nuits lumineuses et glaciales sous le mistral, les étoiles scintillantes, le froid vif, lorsque on partait en famille le soir chez les amis ou les parents marger "la brochette de grives".

La grive ou "tourdre" arrive juste après la vendange. C'est "le passage". Elle vient s'installer dans les bois et bosquets en bordure des vignes pour y passer l'hiver. Elle se nourrit, entre autre, de baies de genévriers, ce qui confère à sa chair une certaine saveur.
Gibier à juste titre très prisé, à la chair fine, ferme et savoureuse. La grive est l'objet de grandes parties de chasse divertissantes entre copains.
Manger la brochette est toujours prétexte à une fête conviviale chez l'un ou chez l'autre. On ne cuisine jamais la brochette uniquement pour soi. Le mot évoque immédiatement la notion de repas entre amis.

Le gibier tué est conservé au frais une bonne semaine. Il est généralement déposé sur le dessus en marbre des cheminées de chambre. Cela permet d'attendrir les chairs et d'en exalter le fumet.
La participation des femmes à cette préparation se limite au déplumage des oiseaux. Travail long et fastidieux. Un journal est déployé sur la table et les plumes arrachées une à une. Attention, pas de courant d'air, interdiction de tousser ou d'éternuer si l'on ne veut pas voir des plumes voler dans toute la maison.
Les grives non vidées sont flambées, bardées de lard, incrustées de quelques baies de genièvre, salées, poivrées et livrées au chasseur pour la suite de la préparation.

Un bon feu est allumé dans la cheminée de la salle à manger. Les grives sont embrochées et maintenues à l'aide d'un "parapluie". Le tournebroche mécanique est remonté, la belle lignée d'oiseaux habillés de lard fait face au feu et commence lentement à tourner sur elle-même. La brochette est lancée.
De grands morceaux de pain sont déposés sous le tournebroche. Ils recueillent le lard fondant et les débris d'entrailles fumantes.

En cuisine on lave la salade sauvage ramassée le jour même dans les vignes. Ce sont de petits plants craquants à point, amers et râpeux sous la langue. On assaisonne généreusement à l'huile d'olive maison.

De temps en temps une sonnerie rappelle qu'il faut remonter le tournebroche à la manivelle afin que la cuisson régulière se poursuive. Les grives "transpirent" et commencent à prendre une belle couleur dorée.

Les invités arrivent, à pied bien sûr. Dehors la nuit est claire et glaciale. Un petit mistral souffle. On entre vite se réchauffer autour de la cheminée et constater que tout se passe bien. L'apéro est servi. Pastis pour les hommes, vin de pêche ou de noix pour les femmes.

Les grives sont débrochées, dressées sur un grand plat et servies à table accompagnées de pain rôti chaud, gras et "sale".
Une grive à chacun. Du bout des doigts en évitant de se brûler on écrase l'oiseau sur la tranche de pain grillé en étalant avec force et générosité, le maximum de viscères, viandes et bardes de lard. C'est la rôtie.
Puis à pleines mains, la bouche grande ouverte, on "attaque la "tranche". C'est croustillant et savoureux.
La salade sauvage craquante et râpeuse sert d'accompagnement. C'est fameux, tous les convives se lèchent les doigts et les babines.
Un rouge de pays arrose le repas et délie les langues. Devant la cheminée qui crépite, l'ambiance est chaude.

Dehors le mistral souffle toujours.
Magnifique repas d'hiver provençal....

Bernard RuffinEybens (38)

J'ai tenu à publier cette recette, car bien que fils d'une Allemande et d'un Français, Bernard Ruffin se comporte, je ne sais par quel mystère, bien souvent comme un Espagnol (Ndlr)

Revenir au début de la page